Au sortir de la guerre, la France a passé contrat avec elle-même. Libérée du joug nazi, il fallait encore qu’elle se libère de ses fantômes. Les termes de ce contrat étaient énoncés dans le Programme du Conseil National de la Résistance. Il fut élaboré en pleine occupation et visait à unir dans un projet commun de reconstruction symbolique et matérielle les forces vives de la nation incarnées par ceux qui avaient désobéi : les dissidents, les tires au flanc, les fortes têtes et les grandes gueules. Ce n’était pas embrassons-nous Folleville, mais il était question de répartir les efforts futurs et les rétributions d’une façon particulière. Ce contrat a été résilié. Le pouvoir a décidé de le déchirer, le jugeant unilatéralement caduc. Aucun nouveau contrat global n’a ensuite été proposé. On jette, on sape, on saborde, et puis on laisse faire et laisse aller selon la méthode ultra-libérale séculaire. Ce qui veut dire qu’on laisse faire les puissants et qu’on laisse tomber les faibles. Le contrat a été dénoncé, cela veut dire qu’il ne lie plus les parties contractantes. Les forces vives de la nation d'aujourd'hui : les dissidents, les tires au flanc, les fortes têtes et les grandes gueules, n’ont plus entre eux qu’à en écrire un autre.
mardi 12 avril 2011
samedi 9 avril 2011
Portugais, encore un effort!
Peuples du monde, l’incurie financière se paie toujours par la rigueur sociale et la victoire éphémère de quelques uns par la défaite de tous ! Les victoires à la Pyrrhus se succèdent maintenant à un rythme soutenu. Mais il n’y a plus guère que les Pyrrhus eux-mêmes pour en profiter. Quand ils auront, à force de victoire, défait la vie entière, leur restera l’âpre satisfaction de n’avoir laissé à personne le soin de leur propre ruine. Je sais qu’ils se paient de mots et qu’ils sont parfois sincèrement convaincus d’œuvrer pour le bien commun. Les bavures se multiplient cependant avec la montée de leur puissance. Les restes, les déchets, les indésirables conséquences de leurs actes s’accumulent, quand ils ne perdent pas simplement le contrôle illusoire de l’incontrôlable. Il n’y a pas que les réacteurs de Fukushima qui fuient. Ça fuit de partout désormais. Les bulles, les sphères, les enceintes de tous ordres s’effondrent massivement. Les bulles sociales, par exemple, lorsque les bulles spéculatives explosent à proximité. Elles se fissurent, se fragilisent, quand le lien symbolique rompt sous les coups du capital agissant pour lui-même et donnant des consignes implicites aux gagneurs, aux vainqueurs, aux quinquagénaires Rollex-men, ou aux jeunes qui en veulent. Presque toute l’énergie humaine disponible est mise au service exclusif de l’immunologie prolétariste (voir plus loin sur ce blog), c’est-à-dire au service de la néantisation. Les signes d’un confort mal partagé ou d’un progrès superficiel masquent encore pour quelque temps la réalité du vide, mais la pression augmente avec la surface de prédation, et aucune prédation supplémentaire n’atténuera les effets des déchaînements premiers. L’évacuation des gazs symboliques comprimés devient nécessaire quand l’explosion menace, mais si l’extérieur vient à manquer, vers quel lieu impossible seront-ils dirigés ? Car c’est bien la possibilité même d’un extérieur qu’a fait disparaître l’intériorité-monde nouvellement formée. Toute explosion exclue, ne reste que l’implosion, lente ou rapide selon le degré de surchauffe. Portugais, grecs, irlandais, encore un effort pour être vraiment riches !
mardi 5 avril 2011
L’affaire Pinocchio
On ne sait pas encore si la petite affaire de Fukushima entrera dans les annales sous le qualificatif d’accident majeur, de catastrophe ou de cataclysme, mais c’est à coup sûr déjà une horreur informationnelle. Mensonges, rétention d’informations, désinformation, manipulations, la panoplie complète du fanatique de l’atome est déballée. Le mensonge est d’ailleurs consubstantiel à l’industrie nucléaire. Les pinocchios japonais voient leurs nezs s’allonger au point de compromettre leur équilibre vertical. Heureusement, ils trouvent chez les Pinocchios français des confrères méritants, capables de leur offrir leurs appendices nasaux comme appuis. Ensemble, ils nous rejouent le sketch comique du « je te tiens, tu me tiens, par la barbichette »… en se mettant nez contre nez pour que nous ayons plus de peine encore à leur tirer les vers. Ils mentent par peur d’affoler les populations et leurs mensonges sont la preuve qu’il y a bien matière à s’affoler. En attendant les contaminations à venir, en provenance du Japon ou d’ailleurs, nous sommes déjà contaminés depuis longtemps par le mensonge technocratique. Le taux de radio-inactivité informationnelle est au plus haut. Il faudrait inventer une mesure du rayonnement DELTA (Désinformation Extrême Livrée par les Très hautes Autorités) et le matériel idoine pour le mesurer. Il serait établi un seuil de nocivité au-delà duquel des procédures prophylactiques seraient appliquées. Arrêt d’urgence des programmes de télévision et de radio, masquage des panneaux publicitaires, par exemple. A force d’accumuler des éléments sans risque pour la santé qui provoquent des maladies mortelles, il faudra se méfier de la santé elle-même, et il sera bien difficile, au bout du compte, d’éviter de mourir de se trop bien porter.
vendredi 1 avril 2011
J’il, J’Il, j’elles, j’on.
Ramené à son expression la plus simple, un corps vivant est une intériorité immunologique (je m’inspire ici de Peter Sloterdijk), c’est-à-dire un objet enveloppé, séparé, voué à sa pérennisation et à sa propagation. Séparé, il ne l’est cependant qu’imparfaitement, puisque son immunologie même nécessite l’interaction avec un milieu. En précisant donc la définition, nous dirons qu’un corps vivant est une intériorité immunologique en milieu (comme on dit « en situation »). Par extension (suivant encore Sloterdijk), nous parlerons d’immunologie sociale, technologique ou symbolique. D’ailleurs, le corps vivant peut être vu à l’extrême comme une société de cellules, les cellules comme des sociétés de molécules, les molécules comme des sociétés d’atomes, etc... Les cellules associées forment le corps vivant et les corps vivants associés forment un corps social plus ou moins complexe et plus ou moins harmonieux. Le corps social humain ajoute à la physique, la chimie et la biologie, des dimensions psychologiques, technologiques et symboliques d’une grande complexité interagissante. Les sociétés vivantes sont donc au final une immense concaténation d’immunologies gigognes imbriqués les unes dans les autres et en interaction permanente. De l’atome à la galaxie, et de la cellules à la Communauté Européenne, des superpositions d’immunologies ayant chacune sa logique et entrant en résonance avec l’ensemble. Un corps n’est jamais seul, un corps n’est jamais séparé. Il ne l’est faussement que pour lui-même, dans une réflexivité déterminée. La conscience et le regard ayant été bâtis pour répondre aux besoins immédiats du corps individuel, ils reconnaissent en priorité les signes de distinction et les reliefs discriminants. Mais l’illusion d’autonomie, pour être naturelle, n’en devient pas moins dangereuse lorsque l’homme acquiert la capacité d’intervenir sur les structures vivantes fondamentales. A ce moment de l’évolution, il creuse sa propre tombe en renforçant la frontière organologique, et l’action qui augmentait jusqu’à présent ses chances de survie se retourne en tsunamis dévastateurs. Un feed-back négatif se met en place et chaque pas effectué dans l’espace de cette autonomie arrogante le rapproche d’une disparition définitive. Sa vision du monde, le produit de sa conscience séparée, entre en contradiction avec les nouvelles nécessités de son être ensemble. Il doit alors changer sa vie et d’abord son regard.
La vision immunologique des choses, que je dois à Peter Sloterdijk, philosophe allemand à qui j’avais déjà emprunté le mot « kunique », permet de penser la liaison des intériorités physiques, biologiques et sociales, et leur profonde unité. Elle ouvre le chemin vers un nouvel holisme non naïf et nécessaire. La théorie unifiée des intériorités, voilà à quoi nous travaillons.
Une première ébauche de cette théorie nous permet déjà de considérer la société humaine, non plus comme un agrégat d’individus se donnant des règles pour vivre ensemble, mais comme une sorte de milieu associé (Bernard Stiegler), constituant un prolongement organique, un système immunologique supérieur, capable, pour le meilleur ou pour le pire, de s’autonomiser par absorption et dilution de ses constituants vivants. Un nouvel être en gestation, en somme, dont nous serions les éléments. Pourquoi n’existerait-il pas en effet une loi universelle de la gravité immunologique pouvant aller jusqu’à la constitution d’un être techno-social autonome à l’échelle monde ? Cet être ne serait peut-être pas viable. Il se verrait peut-être condamné par une trop grande réussite adaptative, comme ces êtres qui, s’étant si parfaitement moulés dans un milieu, finissent par périr au moindre changement extérieur. Ou bien, son immunologie propre étant incompatible avec les ressources terrestres, Peut-être qu’il s’autodétruirait. Quoi qu’il en soit de son avenir, j’affirme que déjà cet être bouge dans nos entrailles communes. J’aurais l’air ici d’un délirant si des projections récentes ayant connus quelques succès sous le nom de posthumanismes n’apportaient du crédit à cette affirmation. Comme Teilhard de Chardin en son temps, mais pour d’autres raisons, les posthumanistes se réjouissent de la fusion prochaine entre l’homme et la machine. Mais si l’anthropologue jésuite attendait de cette fusion l’avènement de l’Esprit, les posthumanistes n’en espèrent que la confirmation de leur optimisme. Pour l’un comme pour les autres, pas d’amélioration individuelle à espérer, seulement l’amélioration mécanique et déterministe d’une mégamachine hybride. Les optimismes chrétien (la création de Dieu ne saurait être mauvaise) et scientiste (la technoscience fait le bien) se rejoignent finalement dans une même idolâtrie cybernétique. Dans les deux cas, il s’agit de privilégier l’intériorité sociale en formation au détriment de l’intériorité individuelle, et donc d’adapter l’individu à un milieu nouveau en révolution permanente et pourtant créé par lui. On s’échine en conséquence, et paradoxalement, à jouer la naturalisation du milieu social associé, au lieu d’en assumer l’artificialité et d’imaginer de le changer en fonction d’un projet humain général. En ce sens, l’anthropotechnique actuelle (encore Sloterdijk), techniques d’amélioration humaine, consciente ou non, rejoint celle du siècle dernier, quand il était question de créer de l’extérieur un homme nouveau. Sloterdijk a raison d’insister, dans son dernier livre traduit en français (« Tu dois changer ta vie » éditions Libela-Maren Sell) sur les systèmes d’exercices despiritualisés comme formes de dressage collectif, avec dompteur unique le plus souvent. Et Nietzsche avait bien annoncé la question essentielle pour les humains théocides de son époque et d’après, quand il forgea en son crépuscule solitaire le concept trop mal connu de surhomme. Surhomme : celui qui s’élève au-dessus de lui-même, l’acrobate, selon Sloterdijk, l’exerçant, l’artiste de la suspension.
Le kunisme en appelle donc à un changement radical passant par une rupture de perspective d’abord, une rupture éthique ensuite. Rupture de perspective en décrivant les choses depuis l’intériorité étendue. Rupture éthique en s’inscrivant dans une ascèse personnelle et donc politique et sociale.
La rupture de perspective, ou rupture épistémologique (esthétique aussi), commence avec le regard sur l’intériorité immunologique, ou les intériorités immunologiques articulées (architecture). Il s’agit d’un regard intérieur qui rompt avec le surplomb réaliste-cynique. Au lieu de situer chaque être humain en observateur extérieur de la réalité, y compris celle de ses propres moyens immunologiques, elle inscrit le regard dans l’observé et ne s’éloigne jamais de la densité corporelle, de la chaleur du Soi immunitaire. Soi avec une majuscule parce qu’il dépasse l’illusion de solitude individuelle et de limite épidermique ou identitaire. Et lorsque ce regard s’exprime, il est obligé d’opérer une révolution des pronoms personnels. Dans le je, il doit saisir la nuance d’indéfini ou de multiple, et dans le il, la nuance d’implication personnelle. J’on ou de j’il pour traduire en langage courant le passage (clandestin tout d’abord) des frontières existentielles. Car pour parler de mon corps social, de l’intériorité immunologique large, enveloppe artificielle immédiatement supérieure à l’intériorité du moi restreint, je ne peux dire, dans le système des pronoms actuel, qu’un je, un on, un il ou un nous. (Je) serait plus exact mais ne dirait rien des autres, (il) ou (on) ne m’impliqueraient pas suffisamment, et (nous) oublierait le milieu associé technologique. Par souci de précision, de vérité, et de renouveau esthético-symbolique, je propose donc les pronoms « j’il », « j’on », « j’Il » et « j’elles » pour référer à un locuteur passe-murailles qui voudrait rompre avec l’illusion native du moi isolé et s’avancer fièrement vers la responsabilité immuno-logique. Ce locuteur ne serait plus, ou plus seulement, dans un espace social, politique, technologique ou cosmique, il serait aussi cet espace même. Responsabilité inouïe, scandaleuse même. Presque aussi haute que celle du Christ rachetant tout seul les pêchés humains. A ceci près que tous les humains seraient Christ et plus seulement en Christ. Imitatio Christi réinterprétée ? Qui sait ? Cette généralisation, cette épidémie christique, ou cette conversion au Soi immunologique, est la seule manière en tout cas de construire un corps social nouveau sans risque d’hécatombes propitiatoires, un homme nouveau sans Goulag ou Stalag ou pogromes ou Inquisitions. Puisqu’il s’agirait toujours de moi partout et toujours, et que tous le sauraient, puisqu’il s’agirait d’un soi, plutôt, qui contiendrait d’emblée tous les autres, la création de l’homme nouveau commencerait toujours par mon autocréation, et donc par une rupture éthique individuelle sans déni du corps social. Comme toute rupture, celle-ci se décompose en trois temps :
1- Le constat, 2- Le refus, 3- L’adoption de ce que Sloterdijk appelle un système d’exercices.
Constat : le système immunitaire général est atteint d’une maladie auto-immune qui menace de détruire ses éléments constitutifs, au moins de leur enlever toute substance personnelle. La méga-machine fonctionne désormais dans une logique autoréférentielle où l’individu n’a plus d’autre place que celle d’instrument. J’appelle ailleurs ce mouvement : collectivisme libéral. Dans le nouveau langage kunique : j’on suis atteint d’une maladie auto-immune sur laquelle il devient urgent de se pencher. Mon Soi est malade. Cette maladie porte aussi les noms de prolétarisme ou (ex)Croissance. Elle menace l’individu restreint avec tout son écosystème.
Le refus découle de ce diagnostique. Je ne considère pas ce déséquilibre comme naturel ou extérieur. Il est mon déséquilibre. Celui que je dois résoudre pour moi-même. Je n’y vois pas non plus un avatar bénin de ce genre de déséquilibres répétitifs ou de fatalités universelles que le principe stoïco-bouddhiste d’impermanence décrit comme illusion. Je crois en un saut qualitatif du déséquilibre qui instaure un nouveau défi spirituel.
L’adoption, enfin, ou conversion, consiste à s’investir dans une série d’exercices concrets d’élévation et de soin. Entre souci de soi, exercices thérapeutiques sociaux et spirituels, il s’agit de s’engager dans la pratique de ce que j’avais nommé ailleurs un « yoga » social. Cette pratique, sorte de thérapie kunique, reste à élaborer.
Adrien Royo
mercredi 30 mars 2011
L'iode à la joie
Les marmitons nippons se brûlent les fesses. Fukushima fout le camp. Ce n’est jamais qu’une grosse marmite sur un réchaud. Mais à faire chauffer de l’eau par excitation d’atomes, on s’expose à la jouissance de la matière, aux spasmes inarrêtables et débordants des nanolibertins libérés. Avant la petite mort lente qui se propage. Les silex atomiques font des étincelles bien longues et nos experts en certitudes s’en caressent les neurones! Ils devraient pourtant savoir, nos thermodynamiciens dynamiques, qu’à produire toujours plus de chaleur en un temps plus court, on n’arrive jamais qu’à accélérer l’avènement du froid. Ce qu’ils veulent, c’est donc pouvoir éclairer la banquise. Sur des feuilles de calculs, ça marche, c’est magnifique. Pensez donc, des petits soleils dans des cuves à mazout ! Bien sages. Avec des poubelles de soleils refroidis tout autour. Comme des petites crottes de chiens radioactives. Des petites crottes de chiens pour 4000 ans. Et dans 4000 ans, les chiens seront tellement plus intelligents ! De la vapeur, encore de la vapeur ! Faites bouillir la marmite ! Nouvelle Alliance de l’homme avec la matière, équivalence masse-énergie, fission, fusion, lumière, chaleur, vapeur, entropie. Rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme… En chaleur… Vous reprendrez bien un peu de Tchernobyl avant de partir pour l’au-delà ! Et si vous devez marcher dans la crotte, n’oubliez pas d’y mettre le pied gauche.
jeudi 24 février 2011
Esclavage contemporain
A las 7:33 sonaron los primeros acordes de la banda sonora de Misión Imposible. El señor XX pulsó la tecla verde de su teléfono móvil y contestó a la llamada. Habló con su interlocutor durante varios minutos y mientras hablaba se dirigió al cuarto de baño, orinó, tiró de la cadena y entró en la cocina. Pulsó la tecla roja y dejó el móvil sobre la encimera. Preparó el café y mientras desayunaba el móvil volvió a sonar. Se duchó, se afeitó, se lavó los dientes y se vistió sin dejar de hacer y recibir llamadas. Misión Imposible. Pitidos de teclas. Condujo su coche hablando por el móvil. Saludó a sus compañeros de trabajo hablando por el móvil. Atendió sus asuntos, almorzó, paseó, se tomó una cerveza con los amigos, visitó a sus padres, jugó con sus hijos, cenó, vio un partido de fútbol en la tele, orinó, se lavó los dientes, se acostó, besó a su esposa, copuló con ella y se durmió… hablando por el móvil.
A la mañana siguiente los de la compañía telefónica instalaron una enorme antena en la cabeza del señor XX.
Texte de Teresa Sopena
Traduction:
A 7h33 résonnèrent les premières notes de Mission Impossible. Monsieur XXe appuya sur la touche verte de son portable et répondit à l’appel. Il dialogua quelques minutes avec son interlocuteur pendant qu’il se dirigeait vers la salle de bain, urinait, tirait la chasse d’eau et regagnait la cuisine. Puis il raccrocha, posa son téléphone, prépara le café, et pendant qu’il petit-déjeunait, le téléphone sonna à nouveau. Il se doucha, se rasa, se brossa les dents et s’habilla sans lâcher l’appareil. Mission Impossible, bruits du clavier, conversations à distances. Il conduisit sa voiture et salua ses collègues en téléphonant. Il traita ses affaires, déjeuna, se promena, but un verre avec ses collègues, rendit visite à ses parents, joua avec ses enfants, dîna, regarda un match à la télé, urina, se brossa les dents, se coucha, embrassa son épouse, copula avec elle et s’endormit, son portable à l’oreille.
Au matin, les employés de la compagnie téléphonique greffèrent sur la tête de Monsieur XXe une énorme antenne.
jeudi 3 février 2011
Prolétarisme, donc, et non capitalisme, pour définir le mode d’exploitation moderne. Tant il faut convenir que le terme communément admis n’évoque plus désormais qu’un sable mouvant conceptuel propice à l’étouffement. Son négatif même est absorbé dans la soupe universelle. Que veut dire anticapitalisme, en effet, sinon intensification des lois fondamentales du capitalisme ?
Répétons-le, notre mode de relation produit et reproduit essentiellement des prolétaires, c’est-à-dire des dépossédés. Comment un anticapitalisme quel qu’il soit pourrait-il jamais changer cela, quand il vise explicitement à étendre cette production ? Anticapitalisme ne veut rien dire d’autre que plus-de-capitalisme, au sens de plus de productivité et donc plus de prolétaires. Ceci en théorie seulement, car, en un paradoxe tout libéral, les conditions d'impossibilité du système rejoignant ses conditions de possiblité, moins d'inégalités relatives, toute chose restant égale par ailleurs, veut dire aussi moins de productivité (l'inverse du but recherché). C’est pourquoi Slavoj Zizek peut légitimement évoquer à ce sujet le plus-de-jouir de Lacan, c'est-à-dire le plus d'angoisse.
L’anticapitalisme, loin de représenter la négation du capitalisme, en est bien plutôt l’intensification, tandis que l’antiprolétarisme, touchant le noyau même du système, négation de la négation, serait la positivation subversive véritable, la seule posture critique adéquate.
Les deux schémas évolutifs antinomiques peuvent donc se résumer ainsi :
1 - Capitalisme ► anticapitalisme ► intensification capitaliste
2 - Prolétarisme ► anti-prolétarisme ► projet d'émancipation
Evidemment, le second s’écarte de la dialectique historique marxienne orthodoxe qui veut que l’avenir soit déjà contenu dans le présent selon une évolution quasi mécanique et linéaire, avec le prolétariat comme sujet historique final. Si l’avenir anti-prolétarial s’appuie inévitablement sur une praxis (comment pourrions-nous partir d’aucun lieu ?) c’est pour en déduire un contre-projet global, et plus seulement pour la prolonger. Nous renouons ainsi, semble-t-il à première vue, avec le socialisme utopique pré-marxien. Certains y verront une régression. Il faut y regarder de plus près car notre conviction est d’être justement, et paradoxalement, plus scientifique que Marx.
Répétons-le, notre mode de relation produit et reproduit essentiellement des prolétaires, c’est-à-dire des dépossédés. Comment un anticapitalisme quel qu’il soit pourrait-il jamais changer cela, quand il vise explicitement à étendre cette production ? Anticapitalisme ne veut rien dire d’autre que plus-de-capitalisme, au sens de plus de productivité et donc plus de prolétaires. Ceci en théorie seulement, car, en un paradoxe tout libéral, les conditions d'impossibilité du système rejoignant ses conditions de possiblité, moins d'inégalités relatives, toute chose restant égale par ailleurs, veut dire aussi moins de productivité (l'inverse du but recherché). C’est pourquoi Slavoj Zizek peut légitimement évoquer à ce sujet le plus-de-jouir de Lacan, c'est-à-dire le plus d'angoisse.
L’anticapitalisme, loin de représenter la négation du capitalisme, en est bien plutôt l’intensification, tandis que l’antiprolétarisme, touchant le noyau même du système, négation de la négation, serait la positivation subversive véritable, la seule posture critique adéquate.
Les deux schémas évolutifs antinomiques peuvent donc se résumer ainsi :
1 - Capitalisme ► anticapitalisme ► intensification capitaliste
2 - Prolétarisme ► anti-prolétarisme ► projet d'émancipation
Evidemment, le second s’écarte de la dialectique historique marxienne orthodoxe qui veut que l’avenir soit déjà contenu dans le présent selon une évolution quasi mécanique et linéaire, avec le prolétariat comme sujet historique final. Si l’avenir anti-prolétarial s’appuie inévitablement sur une praxis (comment pourrions-nous partir d’aucun lieu ?) c’est pour en déduire un contre-projet global, et plus seulement pour la prolonger. Nous renouons ainsi, semble-t-il à première vue, avec le socialisme utopique pré-marxien. Certains y verront une régression. Il faut y regarder de plus près car notre conviction est d’être justement, et paradoxalement, plus scientifique que Marx.
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