jeudi 3 février 2011

Prolétarisme, donc, et non capitalisme, pour définir le mode d’exploitation moderne. Tant il faut convenir que le terme communément admis n’évoque plus désormais qu’un sable mouvant conceptuel propice à l’étouffement. Son négatif même est absorbé dans la soupe universelle. Que veut dire anticapitalisme, en effet, sinon intensification des lois fondamentales du capitalisme ?

Répétons-le, notre mode de relation produit et reproduit essentiellement des prolétaires, c’est-à-dire des dépossédés. Comment un anticapitalisme quel qu’il soit pourrait-il jamais changer cela, quand il vise explicitement à étendre cette production ? Anticapitalisme ne veut rien dire d’autre que plus-de-capitalisme, au sens de plus de productivité et donc plus de prolétaires. Ceci en théorie seulement, car, en un paradoxe tout libéral, les conditions d'impossibilité du système rejoignant ses conditions de possiblité, moins d'inégalités relatives, toute chose restant égale par ailleurs, veut dire aussi moins de productivité (l'inverse du but recherché). C’est pourquoi Slavoj Zizek peut légitimement évoquer à ce sujet le plus-de-jouir de Lacan, c'est-à-dire le plus d'angoisse.

L’anticapitalisme, loin de représenter la négation du capitalisme, en est bien plutôt l’intensification, tandis que l’antiprolétarisme, touchant le noyau même du système, négation de la négation, serait la positivation subversive véritable, la seule posture critique adéquate.


Les deux schémas évolutifs antinomiques peuvent donc se résumer ainsi :

1 - Capitalisme ► anticapitalisme ► intensification capitaliste

2 - Prolétarisme ► anti-prolétarisme ► projet d'émancipation


Evidemment, le second s’écarte de la dialectique historique marxienne orthodoxe qui veut que l’avenir soit déjà contenu dans le présent selon une évolution quasi mécanique et linéaire, avec le prolétariat comme sujet historique final. Si l’avenir anti-prolétarial s’appuie inévitablement sur une praxis (comment pourrions-nous partir d’aucun lieu ?) c’est pour en déduire un contre-projet global, et plus seulement pour la prolonger. Nous renouons ainsi, semble-t-il à première vue, avec le socialisme utopique pré-marxien. Certains y verront une régression. Il faut y regarder de plus près car notre conviction est d’être justement, et paradoxalement, plus scientifique que Marx.

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