Tout le monde voit le
symbole du Yin et du Yang chinois ? un cercle avec deux éléments
qui s'opposent en se liant ? Et bien capitalisme et
anticapitalisme sont les deux éléments qui se lient et s'opposent
tout à la fois dans un cercle que j'appelle, il faut bien nommer les
choses pour qu'elles existent dans un monde humain, prolétarisme.
Dans l'univers de la
marchandise nous sommes tous des prolétaires (du latin
« proletarius » : pauvres qui ne comptent aux yeux
de l’État que pour ses enfants, c'est-à-dire pour le maintien
même de cet État) au service de la valeur s'autovalorisant.
Comprenez bien qu'au niveau du prolétarisme, contrairement au niveau
inférieur avec son opposition factice, il n'y a plus de pauvres ni
de riches mais seulement des prolétaires, des esclaves placés à
des échelons différents de la machine aliénatoire qu'ils créent
eux-mêmes pour eux-mêmes, des autoesclaves en quelque sorte. Le
confort des uns cachant mieux que la pauvreté des autres la même
aliénation fondamentale. C'est pourquoi je recommanderais d'en
revenir aux catégories sartriennes du salaud et de la mauvaise foi.
La mauvaise foi étant le propre de ceux qui se croient libérés par
ce qu'ils possèdent, et deviennent des salauds en privant du
nécessaire les autres esclaves qui eux ne peuvent pas fuir leur
condition réelle d'esclave dans l'imaginaire du confort. Nous sommes
en plein dedans avec la révolte des Gilets Jaunes. Une minorité de
salauds contre la masse des pauvres d'autant plus détestée qu'elle
présente en miroir la réalité existentielle de tous.
Mauvaise foi propre des
salauds, donc... Et parmi ces salauds, au sens sartrien du terme, il
y a les anticapitalistes qui se croient au-dessus des autres parce
qu'ils pensent avoir compris la société de classes, et qui
s'opposent en premier lieu à leurs camarades de classes comme ils
l'ont toujours fait à travers l'histoire. Car le salaud, avant la
conscience réelle de sa condition, préfère le maintien de
l'illusion qui lui vaut une supériorité relative dans le monde de
la mauvaise foi. Il préférera donc toujours l'illusion a la réalité
et la création d'oppositions factices a la réalité du tout
aliénatoire. Il lui faudra trouver des bourgeois d'abord, des petits
bourgeois ensuite, et des fascistes dans un troisième temps, pour
justifier son existence de petit curé prolétarien. Il sera prêt
bien entendu à en inventer si par extraordinaire ils venaient à
manquer dans le monde réel. Le plus souvent, il n'aura pas trop à
chercher, pleins de curés de tous bords étant toujours prêts à en
découdre avec leurs pairs pour maintenir l'illusion qui les promeut.
Mais tout cela paraîtra
sans doute peu scientifique à des esprits bourrés de lumières. Je
vais donc proposer ma propre formule mathématique de la bonne foi :
E=MC2. L'énergie de l'auto-effacement individuel est égale à la
masse technologique multipliée par la vitesse du capital au carré.
Je rappelle aussi que
l'anticapitaliste vise à se libérer du capitalisme pour vivre en
prolétaire, alors que l'antiprolétariste vise à se libérer du
prolétariat lui-même pour vivre en homme. L'anticapitaliste est
donc un marxiste, et l'antiprolétariste un marxien conséquent.
La formule du
prolétarisme, en dernière instance, est la suivante : le
travail social humain vivant détruit le travail social humain
vivant. Comment donc dans ces conditions un prolétaire, vecteur de
ce travail social humain vivant, pourrait-il survivre à sa
disparation ? Dans cet abîme, il y a tout Marx. Que celui qui
veut comprendre comprenne.