On
s'interroge souvent sur la question de savoir si le chômage, en
France et ailleurs, est structurel ou conjoncturel. Question aussi
vide que récurrente. Il est évidemment structurel et général si
l'on admet que le chômage est la forme moderne de ce qui s'appelait
auparavant pauvreté ou misère et pas seulement le nom donné aux
salariés privés d'emploi et indemnisés, rangés sous forme
statistique dans les disques durs des administrations. C'est ainsi
qu'aux États-Unis par exemple, n'est pas chômeur le prisonnier noir
dans sa cellule, le clochard dans les rues de New-York, ou le vendeur
à la sauvette du Missouri, ce qui permet de présenter de belles
statistiques démontrant la parfaite santé de l'économie et la
reprise éclatante après une période de vaches maigres qu'il
fallait affronter avec courage - que voulez-vous la nature est ainsi
faite - après la pluie le soleil, etc.
Cependant le
chômage n'est pas structurel dans le sens où il serait lié à une
structure organisationnelle ou étatique qui pourrait être changée.
Il est structurel en ce sens (Marxien) qu'il est un produit
nécessaire du fonctionnement même de la machine prolétariste, une
conséquence normale de la contradiction interne du système global
de la Valeur s'autovalorisant. Il est structurel parce que ce système
doit impérativement, c'est dans son ADN, détruire ce qui le fait
vivre, à savoir le travail humain productif. Le prolétarisme, ce
que l'on appelle communément le capitalisme, est une « impossibilité
en mouvement » (Marx), une maladie auto-immune du corps social.
Le chômage n'étant qu'un de ses nombreux symptômes. Et comme rien
n'est plus habituel que de prendre le symptôme pour la maladie, on
brandit l'épée de l'économie pour partir à l'assaut du chômage,
tandis que prospère le virus spectaculaire incompris dont l'économie
est le premier support.
Ce regard
sur le monde, le regard du Marx ésotérique, comme dirait Robert
Kurz ou Anselm Jappe, dévoile l'imposture fondamentale de toute
gesticulation étatique. Toute action d'un gouvernement quel qu'il
soit, simple outil au service de la machine fétichiste, pour
éradiquer le chômage, ne peut être qu'une vaste entreprise de
ravalement. Les gouvernants sont des équipes d'esthéticiens chargés
de maintenir le mensonge en état de survie clinique, de refaire une
beauté régulière à un monstre social atteint de la lèpre
marchande. Et Macron est un grand esthéticien, un esthéticien de
gauche par surcroît, ce qui est un gage d'efficacité dans la manipulation des masses encore un peu laborieuses.
Adrien Royo
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