lundi 11 mai 2009

Rappel

Les Kuniques Bleus
Association pour la promotion du kunisme : un contre-cynisme



1- Cynisme : reniement achevé de l’homme.


Le cynique observe son propre monde avec des lunettes astronomiques. Il opère toujours à cœur ouvert dans une situation qui ne l’atteint pas. Mais il se voit aussi comme une chose parmi les choses, et le mépris universel qu’il conçoit n’est jamais que la conséquence du rapetissement fondamental dont l’époque a nourri sa conscience de soi. Le formidable appareillage techno-scientifique dont il s’est doté, le délivre des contraintes naturelles, et le livre pleinement en retour à la contrainte sociale naturalisée. Sa puissance est tout extérieure. En socialisant le naturel, il naturalise inévitablement le social, et au final se dé-nature. Il mute par désaffectation, désindividualisation, désappropriation. Décuplant son pouvoir sur la nature, il abdique tout pouvoir sur lui-même. Car le contrôle de la nature, y compris celle de l’intérieur, s’exerce toujours socialement au prix de son autonomie. Le pouvoir absolu en ce domaine socialise absolument. C’est pourquoi il est si comique d’observer l’agitation besogneuse des libéraux de toute obédience qui travaillent chaque jour à une collectivisation toujours plus totale au moyen des outils qu’ils croyaient avoir forgé pour libérer l’individu. Le cynique est finalement celui qui se perd sans se chercher en croyant s’être trouver. Adaptation, résignation, voilà ses maîtres-mots. Vive la liberté, s’écrie-il, en coupant joyeusement les liens symboliques, désintégrant ainsi, du même coup, l’individu. L’atomisation n’est pas l’émancipation, et la déréliction n’est pas le but. « Aide la machine à te faire disparaître, elle t’aidera à oublier ! » : credo cynique.


2 - Kunisme : naissance de la tragédie.


Le kunique s’observe lui-même dans son devenir. Projection d’individu, il a cette modestie de l’esquisse et la noblesse du grand dessein. Son grand dessein, c’est lui-même. Il ne pense pas être totalement né, c’est ainsi qu’il peut aller vers sa chance.

Face à l’embrigadement, à l’encasernement généralisé que les instances du biocontrôle appellent individualisme, le kunique s’avance nu, armé de sa seule et pauvre subjectivité.

Pour le kunique, cet individualisme que dénoncent les belles âmes citoyennes, sociales, charitables ou nationales, n’est que le mot-écran dont se sert la machine pour escamoter la réalité cruelle d’une dépersonnalisation programmée.

L’humanité, pour le kunique, n’est pas une essence mais une aventure et un projet. Et c’est ce projet qui est actuellement remis en cause par la procédure générale de marchandisation. On ne naît pas humain, on le devient. L’être-humain est une auto-création permanente.



Le kunisme est le moyen de tourner le cynisme contre lui-même en utilisant sa propre force. Redoublant de générosité, le kunique met à nu. Pariant sur l’intelligence, il ne contredit pas le monstre, il lui prend son costume et l’exhibe. Libre à chacun ensuite, malgré tout, de désirer le monstre. Le kunisme est donc un exhibitionnisme. Il en appelle en clair à un vaste coming-out tératologique (du grec teras : monstre).


Par exemple, le kunique exhibera le collectivisme libéral (monstre) qui s’exprime sous la forme paradoxale de la liberté individuelle. La liberté contre la liberté : cela ne vaut-il pas son pesant de cynisme ?

« Cynique » et « kunique » prennent à la même source animale. Chien est « canis » en latin et « kuon » ou « kunos » en grec. Faire le chien est donc également l’attitude de l’un ou de l’autre. Mais le cynique fait la bête, et le kunique l’idiot.

Le kunisme a toujours existé, mais comme condition de l’espoir, il doit être maintenant généralisé.

Le kunisme, c’est aussi en quelque sorte l’humain contre la machine. La machine générale qui n’est pas synonyme de progrès. Le kunique veut faire du socio-technique la matrice de l’individu, et non pas de l’individu l’instrument du socio-technique. En clair, il ne se résigne pas à faire de la disparition de l’individu la condition de son bonheur.

Le kunisme a donc toujours existé, mais il prend aujourd’hui un tour de nécessité tragique. L’alternative devient : cynisme addictif ou kunisme. Rien d’autre. Cynisme addictif étant la formule de l’anti-monde en gestation.

Pensée apocalyptique, diront certains. Eh ! bien, pourquoi pas. Révélation (apocalupsis) et bonne nouvelle forment un tout. D’où le pessimisme exclu.



Adrien Royo

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