mercredi 22 octobre 2008

Slogans et affiches

Pour un affichage massif et immédiat (bon, c'est déjà raté!)


Votre pays, c'est la croissance!

Ne vous demandez pas ce que la Croissance peut faire pour vous,
demandez-vous ce que vous pouvez faire pour la Croissance!

L'avenir en actions!



samedi 18 octobre 2008

Sculptures kuniques (suite)


Avis aux galeristes, mécènes et autres!
Série: "Les jouets"
  • Titre: "Referme toi-même la plaie du monde"

Un emballage de jouet, une boîte en carton imprimé comme celles que l'on trouve au moment de Noël. Sur le carton, ces mots : "Referme toi-même la plaie du monde!" Posé à côté, le contenu de la boîte: une aiguille et du fil de chirurgie sur un plateau d'infirmerie.

  • Titre: "Kit du parfait cynique"

Un emballage de jouet. Sur le carton, ces mots: "kit du parfait cynique". A côté, le contenu de la boîte: faucille, marteau, calculette, compas, stétoscope, scalpel, loupe, petite mappemonde, le "Tao Te King", "L'Art de la Guerre" de Sun Tzu, la Bible, etc.

Autres

  • Titre: "La main invisible"

Photographies des mains des principales fortunes françaises suspendues au plafond d'une église à l'aide de fils métalliques.

jeudi 9 octobre 2008

Richesse privée

L’évolution mécanique des choses fait qu’aujourd’hui plus qu’hier, toute initiative, toute activité individuelle se détache sur un fond d’exercice social. Il s’ensuit qu’aucun individu ne peut, à lui seul, créer une quelconque richesse. Toute richesse individuelle, quelle que soit sa provenance, n'est donc rien d'autre qu'un prélèvement à usage privé d’une part plus ou moins grande de la richesse sociale ou publique. Permis et justifié par la société, les conditions de son accumulation puis de sa conservation doivent aussi, par conséquent, être définies par elle. Un régime de droit exige que ce genre d’élément soit fondé en raison et légitimé.

L’efficacité matérielle, telle qu’elle est comprise aujourd’hui, détachée de toute notion de justice ou de solidarité, sans même parler d’Aliénation, de corps social pathologique ou d’Individu-projet, ne peut à elle seule justifier le prélèvement individuel infini, sauf à faire de cette efficacité même la finalité absolue de toute société, et donc de toute vie humaine. Et si le droit à la propriété garantit le droit à la richesse, s’il le légitime juridiquement, il ne lui confère pas cependant un statut définitif, inconditionnel et illimité. Admettons qu’un individu ait le droit de s’approprier, en fonction de son travail, ou de son mérite personnel, une part plus importante de la richesse globale, rien ne justifie pour autant qu’on lui accorde, en cette matière, un pouvoir discrétionnaire? Dans un souci de cohérence, avec une pointe d’ironie et la volonté de conduire ce raisonnement au-delà des préjugés traditionnels, nous proposerons la formule suivante : puisque la société rémunère une fonction selon le degré qu’elle occupe sur l’échelle de la responsabilité, déterminons le degré de responsabilité générale par la position sur l’échelle des rémunérations. Qu’en échange de l’autorisation donnée à l’individu de s’enrichir librement, nous exigions qu’il assume proportionnellement ses responsabilités pécuniaires vis-à-vis de l’ensemble social dont la richesse ne le sépare pas. Car si nous décidons d’une transcendance : la réalité économique, par exemple, ou la nécessité de créer une plus grande richesse matérielle, encore faut-il, dans une véritable démocratie, qu’elle soumette tous les individus à ses exigences, et pas seulement les moins fortunés d’entre eux. On pourrait soupçonner, autrement, et nous serions forcés alors de rester sur le terrain brutal de la lutte des classes, une partie de la population, d’instrumentaliser l’autre à son seul bénéfice en se cachant derrière un masque de fatalité. Car de deux choses l’une : ou bien nous définissons comme un mal provisoire, et comme infrahumain, le système qui jette l’individu contre lui-même à travers l’altérité, et nous essayons ensemble, riches et pauvres de le dominer, avec pour conséquence nécessaire que les riches seraient moins riches et les pauvres moins pauvres, ou bien nous l’acceptons crûment, et devons nous résigner à considérer comme équivalentes, sa violence intrinsèque et la violence corollaire de réaction. Autrement dit, si la violence est acceptée, au nom d’un certain pragmatisme, comme principe inhérent d’une structure socio-économique, elle ne peut plus être condamnée ailleurs, l’individu ne se dépasse pas lui-même, rien n’est vrai, tout est permis, et les pauvres sont fondés à utiliser la violence pour essayer de conquérir les places que la violence conserve. Il n’est pas douteux, en ce sens, que le nihilisme soit aussi la vérité sous-jacente du monde actuel.

A voir les choses avec lucidité, si l’on comprend bien les experts, le chômage et la pauvreté sont nécessaires à la bonne marche de l’économie. Il existe une limite, par exemple, en deçà de laquelle le taux de chômage devient inflationniste, ce qui veut dire que la situation idéale, économiquement parlant, n’est pas tout à fait le plein emploi, au sens strict du terme, mais un taux de chômage variant en fonction de la réalité globale de chaque pays. Curieusement, cette connaissance ne change pas le regard social porté sur l’individu chômeur qui passe toujours pour un monstre d’inadaptation, voire de paresse, ni ne remet en cause le rêve libéral d’une société où tout le monde serait riche, patron et self-made-man. Les conditions économiques exigent aussi parfois que les salaires soient bloqués, voire diminués, en attendant que la croissance reparte. Aucun nécessiteux n’est pour cela, publiquement, mieux considéré. Le chômeur, comme le pauvre, est pourtant quelques fois, à suivre scrupuleusement la logique économiste sans idée préconçue, civiquement chômeur ou pauvre. Héros de la guerre économique, sacrifié à l’intérêt général comme un soldat, son absence au travail ou sa pauvreté s’avère éminemment patriotique. Pourquoi donc à cet héroïsme-là ne s’attache-t-il aucune reconnaissance ? C’est que la position de strict réalisme économique ne va jamais jusqu'à assumer pleinement les conséquences logiques de ses affirmations. Puisque l'économie est tout, puisque l'individu, pour créer de la richesse, doit nier l'individu, puisque nous devons raisonner en terme de globalité statistique, puisque la révolution permanente dépasse le choix individuel, puisque la jungle artificielle remplace la jungle naturelle, puisqu'en un mot la guerre est la seule réalité présente, pourquoi s'encombre-t-on de vieilles valeurs désuètes? Pourquoi ne pas accepter totalement ce que l'on accepte déjà en partie? Pourquoi le réalisme, si soucieux des faits, s'arrête-t-il en chemin? Miraculeusement, dirait-on, l’intérêt particulier se change en intérêt général pour les uns, et l’intérêt général se change en obligations et charges particulières pour les autres. Cette transmutation alchimique est le secret de la prospérité individuelle selon les canons du temps, ainsi que la figure du nihilisme inavoué de la machine sociale.

« Partage des fruits de la croissance ». Comme cela a l’air généreux et innocent. Comme on a envie de se laisser bercer par cette musique humanitaire. La suavité primesautière et sucrée de l’expression ramène aux souvenirs d’une enfance où l’on partageait les bonbons chipés à la boulangerie. Elle ferait presque sucer son pouce. Mais, « on ne peut partager que quand il y a des choses à partager! » Ah! L’enfant tombe le cul parterre, et l’adulte se relève! Explication: avant, le gâteau était trop petit, les riches étaient obligés de le garder pour eux. Ce n’est pas qu’ils ne voulaient pas, mais il fallait, comprenez-vous, encourager l’investissement. Et l’investissement, c’est quoi? C’est Neuilly! Lorsque tout va mal, il ne faut pas désespérer Neuilly. Ce serait, comprenez-vous, un crime de lèse-croissance! Celui qui a tout perdu doit comprendre qu’il lui faut d’abord penser à Neuilly. Le pauvre doit d’abord donner à manger au riche avant de se nourrir lui-même, sinon la machine s’arrête, et il n’y a plus rien pour personne. Il a froid, il a faim? Le gâteau est trop petit! Qu’il suce son pouce en attendant des jours meilleurs! Et ils viendront, bien sûr, ces jours sans faim, sans froid, sans inquiétude pour le lendemain. S’il ne les connaît pas, ses enfants les connaîtront, ou bien les enfants des enfants, ou bien les autres! La croissance revient! Ca y est! Les sacrifices consentis par Neuilly ont enfin porté leurs fruits! La récolte est belle! On vous l’avait dit! Les entreprises ont rétablies leurs marges, les profits grandissent. A table, les pauvres! Mais non! Pas encore!... Il y a le chômage... Il n’y en aura pas vraiment pour tout le monde. Ceux qui ont la chance de travailler doivent comprendre : priorité à l’emploi! Et l’emploi, c’est quoi? C’est Neuilly, bien sûr! On le sait, maintenant, Neuilly a faim. Alors, poussez-vous! Laissez passer Neuilly ! Et n’oubliez pas, le bonheur c’est pour demain matin! Aidez-vous, Neuilly vous aidera! Travaillez! Travaillez! Travaillez dur! Et un jour, vous aussi vous habiterez Neuilly! Tout le monde habitera Neuilly! Et qui descendra la poubelle?

Cela nous rappelle une vieille histoire édifiante, toujours d’actualité, qui mettait en scène deux hommes traversant un désert, dont l’un était monté sur les épaules de l’autre et s’efforçait par tous les moyens, sauf un, d’adoucir la situation du malheureux compagnon qu’il chevauchait. Il lui donnait à boire, l’encourageait, lui prodiguait toute sorte de soins, mais il ne lui venait jamais à l’esprit, tant la condition de sa monture lui paraissait naturelle et indépassable, de mettre pied à terre et de marcher lui-même.

dimanche 5 octobre 2008

Au seuil du monde

Le kunisme évoque la position de l'ingénu se portant sur le seuil du monde en l'inventant (car il n'est pas donné).

Le kunisme est donc une "élévation au seuil", un trou dans la machine avec rien encore derrière ou devant.